Dans le cadre de notre projet nous avons souhaité recueillir des témoignages concernant la place de la femme au Rwanda comme en France et même ailleurs.
Témoignage n°1 :
Nationalité : Française
Âge : 19 ans
"Mayotte,
Mon expérience sur l’île de Mayotte m’a vraiment ouvert les yeux sur les inégalités hommes femmes. J’y suis allée à un âge où les esprits se forment. Auparavant, j’ai vécu dans les îles de Wallis puis de Guadeloupe, sans m’être vraiment intéressée à la condition de la gente féminine. Mayotte m’a permis de mûrir en me faisant voir que tout n’est vraiment jamais tout blanc ou tout noir. Mayotte, c’est l’Afrique. Pas une île paradisiaque des Caraïbes. Le sable y est noir et la terre, rouge. En arrivant sur l’île, les premiers mots que j’ai appris sont « caribou » et « sousou ». Signifiant respectivement « bienvenue » et « pute ». Cet élément peut paraitre anodin si l’on sait que dans un pays étranger, la première chose que l’on apprend sont les insultes, mais il me parait révélateur de la place que l’on réserve à la femme, le terme « sousou » n’étant destiné qu’à ces dernières. Etant curieuse de nature et plutôt sociable, j’ai pu lors de mes quatre années la bas lier des amitiés fortes, qui m’ont permis de mieux comprendre la vie sur l’île, en faisant fi des préjugés. La vie était dure pour les mahorais, mais surtout pour la grande majorité de clandestins vivant à Mayotte. La religion qui régnait était la religion musulmane, dont plus de 90% de la population était pratiquante. Et comme en France, les histoires malheureuses concernant les curés sont les mêmes que celles concernant les imams sur les personnes fragiles, telles les enfants. Combien de fois ai-je entendu des professeurs d’écoles publiques me raconter ce genre d’horreurs ? A ce stade, autant les petites filles que les petits garçons en souffraient, sans que ces derniers puissent réagir ni en parler à leurs parents. Les premières victimes étant bien sur les enfants de clandestins, vu leur situation précaire. Une histoire qui m’a été contée et dont je ne doute pas et celle d’une petite fille, justement issue d’une famille de clandestins, âgée de 9 ans et vendue pour les besoins de sa famille à un homme mahorais. Encore un récit, celui d’une jeune anjouanaise, souhaitant rejoindre Mayotte avec son bébé, ayant sacrifié son corps pour « payer » le passeur, n’arrivant pas à faire taire son enfant sur le kwasa kwasa, ces bateaux de fortune qui permettaient de faire la navette entre Anjouan et Mayotte, à 70km l’une d’elles. Le passeur lui dit que la PAF arrivait, que son bébé les feraient repérer. Tout le monde sur le bateau y crut. La jeune femme fut obligée, sous la pression des autres, de noyer son bébé, de l’abandonner en haute mer. Une fois le calme revenu, le passeur avoua qu’il n’avait rien entendu, et la jeune femme fut contrainte de crier en silence sa douleur. Les histoires de ce genre sont en général tues sur l’île, et ce n’est qu’à la fin de mon séjour que j’en ai eu connaissance. Cependant, au collège, en classe de troisième, une amie âgée alors de 15 ans qui avait déjà eu deux enfants, sacrifiait ses études pour pouvoir s’occuper d’eux, tandis que son mari un peu plus âgé qu’elle, ramenait l’argent à la maison. Je me souviens d’une fois où je l’ai aidée chez elle à faire son ménage, nous avions beaucoup parlé. Et ce qui m’a marquée, c’est la gratitude qu’elle portait à son époux. Elle, issue d’une famille de clandestins, lui, mahorais, s’aimaient, je n’en doute pas. Mais à nos yeux de « mouzoungous », les blancs ou plus généralement les étrangers de l’île, il était dur de le concevoir. En effet, la culture est très différente de celle qu’on nous inculque en France métropolitaine. La bas les femmes sont traitées très différemment. Ce n’est pas une question de plus évoluée ou pas. C’est juste différent. Ce qui a pu me sembler bizarre c’est l’âge auquel les jeunes femmes se mariaient et concevaient des enfants. Ou encore la place des femmes mahoraises dans la famille, qui vue de l’extérieur, peut sembler précaire de par la polygamie qui persiste à Mayotte. Pourtant, l’homme est obligé d’entretenir son épouse, et la plupart de mes camardes avaient beaucoup de respect pour leurs mères. En ce qui concerne ce qui m’a choquée au tout début de mon séjour, voici des anecdotes sur la façon dont les garçons nous traitaient, nous les mouzoungous. Le jour de ma rentrée, je portais une jupe. Et dès le premier jour au collège, on me l’a soulevée. Egalement j’avais les cheveux longs à l’époque, et je me souviens qu’en allant au collège, on me les caressait, me les tirait. J’ai vite jugé ce comportement primitif. Il résultait pourtant de la « curiosité » que suscitaient des cheveux longs, raides et lisses comparés à des cheveux courts et crépus. Egalement, la façon de danser n’est pas la même d’une culture à une autre, et les collés serrés me gênaient au début quand vers la fin, il me semblait normal de danser d’une telle façon sur ce genre de musiques langoureuses et rythmées. Aussi, pour rentrer chez moi, je traversais seule un bidonville. Je ne me suis jamais sentie en insécurité. Tout est question de culture. La place de la femme mahoraise diffère de nos modes de vie occidentaux. La vie sur l’ile n’étant pas la même que la vie en métropole, j’ai été forcée de porter un regard critique, quand j’ai adoré les quelques années que j’y ai passé !
Je veux juste montrer que ce n’est ni l’Inde ni le Qatar… Après j’ai omis les frasques de l’armée ou des hommes mariés sur les malgaches mineures dans les bars. Ce sont les hommes blancs qui font peut être le plus d’écarts."
"Mayotte,
Mon expérience sur l’île de Mayotte m’a vraiment ouvert les yeux sur les inégalités hommes femmes. J’y suis allée à un âge où les esprits se forment. Auparavant, j’ai vécu dans les îles de Wallis puis de Guadeloupe, sans m’être vraiment intéressée à la condition de la gente féminine. Mayotte m’a permis de mûrir en me faisant voir que tout n’est vraiment jamais tout blanc ou tout noir. Mayotte, c’est l’Afrique. Pas une île paradisiaque des Caraïbes. Le sable y est noir et la terre, rouge. En arrivant sur l’île, les premiers mots que j’ai appris sont « caribou » et « sousou ». Signifiant respectivement « bienvenue » et « pute ». Cet élément peut paraitre anodin si l’on sait que dans un pays étranger, la première chose que l’on apprend sont les insultes, mais il me parait révélateur de la place que l’on réserve à la femme, le terme « sousou » n’étant destiné qu’à ces dernières. Etant curieuse de nature et plutôt sociable, j’ai pu lors de mes quatre années la bas lier des amitiés fortes, qui m’ont permis de mieux comprendre la vie sur l’île, en faisant fi des préjugés. La vie était dure pour les mahorais, mais surtout pour la grande majorité de clandestins vivant à Mayotte. La religion qui régnait était la religion musulmane, dont plus de 90% de la population était pratiquante. Et comme en France, les histoires malheureuses concernant les curés sont les mêmes que celles concernant les imams sur les personnes fragiles, telles les enfants. Combien de fois ai-je entendu des professeurs d’écoles publiques me raconter ce genre d’horreurs ? A ce stade, autant les petites filles que les petits garçons en souffraient, sans que ces derniers puissent réagir ni en parler à leurs parents. Les premières victimes étant bien sur les enfants de clandestins, vu leur situation précaire. Une histoire qui m’a été contée et dont je ne doute pas et celle d’une petite fille, justement issue d’une famille de clandestins, âgée de 9 ans et vendue pour les besoins de sa famille à un homme mahorais. Encore un récit, celui d’une jeune anjouanaise, souhaitant rejoindre Mayotte avec son bébé, ayant sacrifié son corps pour « payer » le passeur, n’arrivant pas à faire taire son enfant sur le kwasa kwasa, ces bateaux de fortune qui permettaient de faire la navette entre Anjouan et Mayotte, à 70km l’une d’elles. Le passeur lui dit que la PAF arrivait, que son bébé les feraient repérer. Tout le monde sur le bateau y crut. La jeune femme fut obligée, sous la pression des autres, de noyer son bébé, de l’abandonner en haute mer. Une fois le calme revenu, le passeur avoua qu’il n’avait rien entendu, et la jeune femme fut contrainte de crier en silence sa douleur. Les histoires de ce genre sont en général tues sur l’île, et ce n’est qu’à la fin de mon séjour que j’en ai eu connaissance. Cependant, au collège, en classe de troisième, une amie âgée alors de 15 ans qui avait déjà eu deux enfants, sacrifiait ses études pour pouvoir s’occuper d’eux, tandis que son mari un peu plus âgé qu’elle, ramenait l’argent à la maison. Je me souviens d’une fois où je l’ai aidée chez elle à faire son ménage, nous avions beaucoup parlé. Et ce qui m’a marquée, c’est la gratitude qu’elle portait à son époux. Elle, issue d’une famille de clandestins, lui, mahorais, s’aimaient, je n’en doute pas. Mais à nos yeux de « mouzoungous », les blancs ou plus généralement les étrangers de l’île, il était dur de le concevoir. En effet, la culture est très différente de celle qu’on nous inculque en France métropolitaine. La bas les femmes sont traitées très différemment. Ce n’est pas une question de plus évoluée ou pas. C’est juste différent. Ce qui a pu me sembler bizarre c’est l’âge auquel les jeunes femmes se mariaient et concevaient des enfants. Ou encore la place des femmes mahoraises dans la famille, qui vue de l’extérieur, peut sembler précaire de par la polygamie qui persiste à Mayotte. Pourtant, l’homme est obligé d’entretenir son épouse, et la plupart de mes camardes avaient beaucoup de respect pour leurs mères. En ce qui concerne ce qui m’a choquée au tout début de mon séjour, voici des anecdotes sur la façon dont les garçons nous traitaient, nous les mouzoungous. Le jour de ma rentrée, je portais une jupe. Et dès le premier jour au collège, on me l’a soulevée. Egalement j’avais les cheveux longs à l’époque, et je me souviens qu’en allant au collège, on me les caressait, me les tirait. J’ai vite jugé ce comportement primitif. Il résultait pourtant de la « curiosité » que suscitaient des cheveux longs, raides et lisses comparés à des cheveux courts et crépus. Egalement, la façon de danser n’est pas la même d’une culture à une autre, et les collés serrés me gênaient au début quand vers la fin, il me semblait normal de danser d’une telle façon sur ce genre de musiques langoureuses et rythmées. Aussi, pour rentrer chez moi, je traversais seule un bidonville. Je ne me suis jamais sentie en insécurité. Tout est question de culture. La place de la femme mahoraise diffère de nos modes de vie occidentaux. La vie sur l’ile n’étant pas la même que la vie en métropole, j’ai été forcée de porter un regard critique, quand j’ai adoré les quelques années que j’y ai passé !
Je veux juste montrer que ce n’est ni l’Inde ni le Qatar… Après j’ai omis les frasques de l’armée ou des hommes mariés sur les malgaches mineures dans les bars. Ce sont les hommes blancs qui font peut être le plus d’écarts."
Témoignage n°2
"Je suis
une fille de 19 ans actuellement élève en prépa scientifique à Toulouse. Je suis franco-américaine, je suis née aux Etats-Unis et j’ai principalement vécu au
Moyen-Orient ainsi qu’en Asie où j’ai été scolarisée dans des lycées français
ou internationaux.
La place des
femmes dans les différents pays d’Asie où j’ai vécu était sensiblement la même,
j’ai cependant le sentiment que dans les sociétés plus « modernes »
comme Hong-Kong ou Singapour la condition des femmes était meilleure. Ainsi
à Hong-Kong ou à Singapour, même si les femmes étaient légèrement désavantagées
dans le monde du travail, on leur fournissait un réel soutien. Elles pouvaient
recevoir des bourses universitaires qui leur étaient réservées et les
entreprises menaient de véritables actions de promotion de la parité. Pour ma
part je ne me suis jamais sentie discriminée dans ces pays-là. La situation à
Hong-Kong est très différente de celle dans le reste de la Chine car même si
Hong-Kong appartient à la Chine il en reste très indépendant en ayant son
propre mode de gouvernement et une liberté d’expression plus affirmée. Même si
dans les sociétés plus traditionnelles, la femme est souvent discriminée, il y
existe aussi une forme de respect envers elle qui peut se traduire par une
attitude protectrice des hommes envers les femmes.
J’ai également
vécu à Oman. Même si j’étais petite à ce moment-là, j’y ai ressenti le manque
d’autonomie des femmes. Il faut cependant reconnaître que les droits de l’Homme
y étaient mieux respectés que dans le reste de la péninsule arabique. Ainsi ma
mère pouvait conduire alors qu’elle n’en avait pas le droit lorsqu’elle séjournait
au Yémen ou en Arabie Saoudite où elle devait de plus porter le voile. J’étais
dans une école internationale qui était mixte et les filles autour de moi
allaient toutes à l’école, cependant cela n’est peut-être pas représentatif de
la situation de l’éducation des filles dans ce pays car je vivais dans la
capitale et il se peut que cela ait été différent dans le reste du pays.
Je ne pense pas
qu’il y ait de corrélation directe entre régime politique et respect des droits
des femmes. Oman est une monarchie et pourtant la femme y a une place plus
enviable que dans les pays voisins, de même Singapour est un régime autoritaire
et la place de la femme y est aussi bonne voire meilleure qu’en France.
J’ai le
sentiment que la France n’est pas très en avance sur les questions d’égalité
hommes-femmes par rapport à ses voisins européens comme semblent le montrer les
statistiques concernant les écarts de salaires ou la parité dans les
entreprises. Je n’ai cependant pas ressenti personnellement de discriminations depuis les quelques mois
que je vis en France.
La situation aux
Etats-Unis est relativement proche de celle de la France mais plus d’efforts y
sont faits pour promouvoir la place de la femme. Il me semble qu’il y a là-bas
une véritable prise de conscience de ces problèmes et une volonté de les
résoudre qui est plus verbalisée. On y offre des bourses pour permettre aux femmes d’étudier, les
universités et les entreprises affichent une réelle volonté d’améliorer la parité,
des conférences sont consacrées à ces thèmes et l’éducation est aussi centrée
autour de ces problématiques. Il s’agit d’une spécificité qui me semble commune
aux pays anglo-saxons, j’ai ressenti cette même volonté de promouvoir la place
des femmes lorsque j’ai rempli des dossiers pour des universités britanniques.
Un problème aux Etats-Unis est la place des femmes dans les médias, au cinéma,
à la télévision, dans les magazines ou dans la littérature. L’industrie
cinématographique par exemple est presque totalement masculine et elle ne
reflète pas la réalité de la société quant à la place des femmes mais seulement
le point de vue de certains, par exemple elle véhicule l’image de la pom-pom
girl tête en l’air, ne pensant qu’à son apparence,… je ne dis pas que certaines
filles ne sont pas comme cela mais cela relève quand même du cliché. Le
problème est que ces médias ont une portée mondiale et une très large
diffusion, ils véhiculent donc une image fausse de la femme et font croire à
leur auditoire qu’il s’agit de la réalité.
Je n’ai pas été
très surprise par les inégalités hommes-femmes que j’ai remarquées dans les
sociétés les plus traditionnelles mais j’ai pu être choquée par la réaction de
certaines personnes. Ainsi lors d’un cours d’éducation civique au collège nous
avons abordé la question des droits des femmes. Étant dans un lycée français
j’étais entourée de gens ayant une certaine éducation et ayant été confrontés à d’autres cultures que la leur
ce qui aurait dû leur conférer une forme d’ouverture d’esprit. Un garçon m’a
cependant affirmé : « C’est normal que les femmes gagnent moins que
les hommes car quand elles ont leurs règles elles sont moins efficaces que les
hommes. », j’ai été particulièrement choquée par ses propos étant donné
que celui qui les tenait avait deux sœurs.
J’ai côtoyé des
filles vivant dans des familles mixtes (un parent européen et un parent
asiatique) et j’ai été troublée de remarquer que certains réflexes demeuraient
très présents. Les filles en particulier étaient traitées très différemment des
garçons. Les parents laissaient leurs fils se montrer irresponsables alors
qu’ils attendaient beaucoup de maturité de leurs filles dès leur plus jeune âge.
Ainsi ils auraient ri de voir rentrer leur fils ivre à minuit après une soirée
alors que dans la même situation ils auraient été beaucoup plus sévères envers
leur fille. Même si la pression venait le plus souvent du parent asiatique,
l’autre parent cautionnait voire exerçait le même type de pression sur sa
fille. Par ailleurs ces familles attendaient souvent que leurs enfants entrent
dans certains schémas préétablis, ils n’auraient pas voulu que leur fille fasse
du rugby ou leur fils de la danse même si je pense qu’en insistant leurs
enfants auraient pu venir à bout de leurs réticences.
J’ai déjà eu
quelques expériences professionnelles qui m’ont fait me confronter aux
inégalités hommes-femmes. Ainsi j’ai été serveuse, lorsque je vivais à
Hong-Kong, et j’ai dû faire face à des clients malpolis, des personnes qui me
sifflaient, et j’avais conscience qu’ils ne se seraient jamais comportés comme
cela avec un homme. Je ne pense pas que cette expérience aurait été très
différente si je l’avais vécue en France. A l’inverse au cours de mes études,
au lycée français, je n’ai jamais eu le sentiment d’être discriminée. J’ai également
fait un stage à L’Oréal Paris dans la zone de Singapour. J’y étais entourée
d’un personnel à 80% féminin, les dirigeants des marques étaient des femmes
mais les deux plus hauts postes étaient occupés par des hommes.
Même
si beaucoup de progrès restent à faire, certaines initiatives qui ont pu être
prises dans les différents pays que j’ai traversés montrent une véritable prise
de conscience de ces problématiques liées à l’égalité homme-femme et une
volonté de venir à bout de ces discriminations."
Témoignage n°3 :
"
Je suis algérienne et je vis en
France depuis quelques années, je suis actuellement dans une école
d’ingénieurs.
A mes yeux le statut de la femme
est très différent entre l’Algérie et la France. En Algérie la femme est,
encore actuellement, une éternelle mineure ; ainsi pour quitter le
territoire j’ai du fournir une autorisation paternelle (pas parentale) alors
même que j’étais majeure. La femme est considérée comme un être désirable, ce
qui est mal perçu, cela entraîne deux types de réactions de la part des
hommes : une volonté de draguer ou une attitude agressive (certaines de
mes amies se sont faites insultées pour s’être habillées de manière trop
découverte). On observe cependant des avancées mais pas dans tout le pays, je
ne viens pas de l’Algérie profonde où l’islam est le plus fortement ancré mais
en voyageant j’ai vu l’islam radical. Ainsi certaines femmes se disent libres
sans l’être réellement : elles sont libres de petites décisions mais tout
repose encore sur les épaules du mari même si ce seront toujours les femmes qui
paieront les pots cassés si le mari prend une mauvaise décision, ces femmes
sont obligées de s’habiller en noir et de se couvrir intégralement malgré la
chaleur. Ces femmes appartiennent majoritairement à des milieux pauvres, dans
les milieux plus aisés les femmes se battent pour s’habiller comme elles le
souhaitent sans s’habiller pour autant de manière provocante.
La situation que je décris est
relativement récente, elle date à peu près du moment où le FIS est passé au 2nd
tour des élections (à la fin des années 80 – début des années 90). Après le
départ de la France en 1962, les femmes avaient une certaine liberté, il
régnait un état d’esprit ouvert ; le FLN était le parti unique et sous sa
gouvernance les inégalités se sont creusées, les pauvres devenus encore plus
pauvres se sont tournés vers un islam radical, c’est ainsi qu’on a pu observer
la montée de l’islam radical. Puis sous l’impulsion populaire le multipartisme
est apparu et lors des élections le FIS est passé au 2nd tour ce qui
a alerté les pays occidentaux et une partie de la population algérienne. On a
alors assisté à des lapidations, des viols publics, des jets d’acides sur les
filles et les femmes. L’interruption des élections a généré une guerre civile
au milieu de laquelle des émirs (des chefs terroristes) ont pratiqué des viols
de jeunes filles vierges au travers de ce qui a été appelé « le mariage
qui ne dure qu’un jour » cela représentait un véritable calvaire pour ces
filles devenues après leur viol mères célibataires. Depuis la réconciliation
nationale, on observe une génération qui a gardé l’empreinte du climat qui
régnait au départ de la France en 1962 (comme ma mère qui le tient de son père)
et qui a eu des enfants comme moi qui rejettent cet islam radical, qui refusent
de porter le foulard et qui se révoltent sans être dans la provocation mais
plutôt par le savoir pour montrer que l’on peut réussir mieux que les hommes
dans les domaines qui leurs sont « réservés ». Cette génération fait
son chemin petit à petit mais elle côtoie des filles qui se détruisent
elles-mêmes en se disant libres alors qu’elles s’enferment.
Il règne encore l’idée que tout
l’honneur d’une femme, pardonnez-moi l’expression, réside entre ses jambes.
Cette vision de la femme est extrêmement réductrice. Les hommes frustrés se
montrent agressifs et embêtent les femmes mais les 1e à critiquer
les femmes sont les femmes.
En voyageant en Algérie, nous
nous sommes retrouvées, ma sœur et moi, dans une ville côtière. Nous voulions
acheter des maillots et à peine sorties de la voiture nous avons croisé une
femme en djibab, nous n’avons pas pu acheter de maillots, la plage elle était belle
et ensoleillée mais personne ne s’y baignait. De même nous avons une maison au
bord de la plage mais nous n’y allons pas parce qu’on se ferait mal regarder si
on se mettait en maillot de bain. Les différences d’une région à l’autre sont
gigantesques, elles sont liées à l’aisance matérielle et à l’éducation.
Petite j’avais dit à ma mère
qu’être une fille c’était mieux que d’être un garçon car on pouvait porter des
jupes, des pantalons, des robes, des shorts,… alors que le garçon doit porter
des pantalons ou des shorts et ma mère avait ri sans que je sache pourquoi,
petit à petit j’ai compris pourquoi.
En France, dans ma classe de
prépa nous étions 4 filles pour 42 élèves mais cela ne posait pas problème. Ici
je peux être moi-même, je n’ai pas honte, je peux sortir le soir (alors qu’en
Algérie une jeune fille doit rentrer avant le coucher du soleil). Au début de
mes études en France, je rentrais tous les soirs à 19h mais la femme chez qui
je logeais m’a encouragée à sortir et lors de ma 2e année je me suis
vraiment épanouie. C’est le grand atout, à mes yeux, de la France par rapport à
l’Algérie, j’ai envie de rentrer pour revoir ma famille mais là-bas je ne peux
pas être une femme. En France un homme peut dire du mal d’une femme mais il ne
sera pas suivi alors qu’en Algérie il sera suivi par d’autres hommes, c’est
toujours la faute des femmes. Le problème en Algérie est que les hommes ont
trop de pouvoir. Bien sûr il ne faut pas faire de généralités il y a des hommes
très bien en Algérie et je me suis déjà faite embêter par des hommes en France."
En fait (sans vouloir être casse-bonbons), ce serait plus pratique si vous disposiez les témoignages dans l'autre sens : à chaque fois qu'il y en a un nouveau il s'ajoute en hait et on le voit tout de suite.
RépondreSupprimerEn tout cas, c'est très intéressant à lire, merci !